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Sandrine Ben David
3 août 2008

Surréalisme

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SAISON SURRÉALISTE AU MUSÉE D'ISRAEL
par Sandrine Ben David

Depuis ses origines, au commencement du mouvement dadaiste 1916 et jusqu'à ses applications les plus récentes dans l'art contemporain international, le surréalisme fait l'objet d'une grande exposition, actuellement au Musée d'Israel.

Cette exhibition présente au public quelques trois cents oeuvres des plus grands créateurs de ce célèbre mouvement artistique : Jean Arp, Herbert Bayer, André Breton, Luis Bunuel, Giorgio de Chirico, Joseph Cornell, Salvador Sali, Paul Delvaux, Marcel Duchamp, Max Ernst, Hannah Hoch, Paul Klee, Renée Magritte, Léo Malet, Joan Miro, Francis Picabia, Pablo Picasso, Jackson Pollock, Man Ray, Kurt Schwitters ... Ces pièces sont pour la plupart héritées de la collection privée de Vera et Arturo Schwartz, amis et bienfaiteurs du musée.

Mise en espace sur le mode thématique, l'exposition offre une vision de l'école avant-gardiste à travers un éventail de toutes les stratégies artistiques et de tous les médias innovateurs utilisés par les artistes de ce mouvement : la peinture, la sculpture, mais aussi le Ready-made, le collage, l'assemblage, la photographie, le photo montage et le cinéma. Elle propose, en outre, un certain nombre de travaux d'artistes modernes contemporains, étrangers et israéliens (Ghada Amar, Boaz Adar, Mark Dion, William Kentridge, Eden Ophrat et Alexis Rockman), influencés par le mouvement surréaliste, ainsi que plusieurs oeuvres contextuelles ethniques, en particulier africaines et océaniques, illustrant certaines des sources d'inspiration des artistes.

La partie de l'exposition intitulée « Automatisme et son évolution » concerne l'exploitation qu'a effectué le mouvement surréaliste des cheminements cachés de l'esprit. Les écrivains et les artistes ont développé les techniques de l'automatisme pour libérer les travaux du carcan de la pensée consciente. Arshile Gorky a utilise le dessin automatique pour créer le mystère et l'ambiguité dans ses tableaux. Man Ray a appliqué, lui, ses techniques à travers le média photographique. Ses Rayographes de 1921 sont produits sans l'usage d'un appareil photo. Les objets sont posés directement sur un film sensible, puis exposés à la lumière. Il a utilisé le meme procédé pour la réalisation de son court-métrage de 1923, Retour à la Raison, lui aussi visible parmi les fims de l'exposition.

« Désir » est le titre du volet consacré à l'inconscient humain, aux fantasmes, aux phobies et aux inhibitions explorées et exprimées par les artistes surréalistes à travers leurs oeuvres, dans l'objectif de libérer désir et libido et de faire de leur art une forme de rébellion contre les censures sociales et politiques de leur temps. Cette section inclut, entre autres travaux, Le Reve de Vénus, célèbre photographie de Salvador Dali et et Horst P. Horst prise en 1939, qui montre une femme vétue d'un masque et d'un costume érotique, une anguille autour de la taille, tenant dans sa main une huitre et un homard sur ses genoux, références du discours surréaliste masculin sur la sexualité et le traumatisme. Mélangeant humour, sexe et provocation, le Squirrel de Meret Oppenheim (1960) est un objet représentant une chope de bière moussue dont la anse est une queue d'écureuil.

La section «Illusion et Paysage révé » de l'exhibition examine la théorie surréaliste du potentiel libérateur contenu dans les reves et l'imaginaire. Les paysages surréalistes évoquent le mystère et interpellent notre perception de la réalité, en juxtaposant des objets sans connections, souvent à l'intérieur d'espaces ou les éléments temporels et spatiaux sont déformés. Principales parmi les oeuvres concentrées sur ce thème, les inventions poétiques de Renée Magritte sont de simples images ou objets, dont l'impact est décuplé grace à des associations complexes et à l'usage de l'illusion. Son tableau de 1959 intitulé Le château des Pyrénées exprime le sentiment du déséquilibre, à travers un énorme rocher surmonté par un chateau, en lévitation dans un ciel bleu nuageux, au dessus de la mer. Le Coeur de Pic (1936), photographie colorée à la main de Claude Cahun, qui montre des mains de poupées assemblées en fleur de tournesol, est aussi présentée dans cette section.

Le volet « Biomorphisme et Métamorphose » reflète la tendance surréaliste à favoriser les formes ambigues et organiques et à s'inspirer de l'anatomie, des plantes, des corps liquides et de l'astronomie. Parmi les oeuvres exposées dans cette partie de l'exposition, se touvent le Fruit Torso de Jean Arp (1960), qui assimile la vie végétale à la forme féminine pour exprimer la procréationcomme la métaphore de la création artistique, et la sculpture de bronze de Max Ernst intitulée Le Roi jouant avec la Reine (1944), qui révèle l'influence que l'art primitif africain et en particulier les poupées Hopi Kanicha ont eu sur cet artiste.

« Juxtapositions Merveilleuses » est le titre de la section qui explore l'usage d'objets finis ou ready-made, dans l'art surréaliste, à travers le collage, le montage ou bien la simple juxtaposion. Des objets de la vie courante sont réunis de manière inattendue pour surprendre, séduire et désorienter le spectateur. Par exemple, la Fontaine (1917-1964) de Marcel Duchamp, dont le titre suggère la beauté et l'esthétique, est ne réalité ce fameux urinoir à l'envers. Le Dada-Ernst (1920-1921) de Hannah Hoch, membre du mouvement dadaiste de Berlin, rassemble des clichés disparates pris dans les médias et propose ainsi une critique de la construction des statuts sexuels dans l'Allemagne weimarienne. Autre oeuvre exposée dans cette section, l'Enigme d'Isidore Ducasse est une machine à coudre enveloppée dans une couverture militaire, qui illustre dadaiquement la fameuse maxime du comte de Lautréamont : « ... belle comme la rencontre fortuite entre une machine à coudre et un parapluie sur une table opératoire ».

Plusieurs des oeuvres ready-made ont étée judicieusement suspendues au plafond de la salle d'exposition par le responsable de l'arrangement muséal, créant ainsi une nouvelle portée à leur pouvoir évocateur par leur situation incongrue dans l'espace et par de singuliers jeux d'ombres et de lumière. L'héritage inestimable du mouvement surréaliste dans l'art contemporain est superbement illustré dans l'exposition « Surréalisme et au-delà » par le projet de Mark Dion spécialement commissionné par le Musée d'Israel et intitulé Package, en référence à la fameuse énigme de Man Ray. Mark Dion a envoyé, depuis différents points du globe, des paquets de différentes formes et tailles au musée, en interdisant formellement à la curatrice de l'exposition Adina Kamien-Kazhdan de les ouvrir, mais avec l'autorisation de les radiographier pour tenter de deviner leurs contenus énigmatiques. L'installation de l'artiste expose la totalité de ces paquets postaux, face à face avec leurs radiographies et illustrés par d'autres objets surréalistes issus de la collection du musée. Au centre de cette installation, Mark Dion a placé une collection de lettres et d'enveloppes tirées de la riche correspondance de Arturo Schwartz avec différents artistes surréalistes.

Parmi les oeuvres israéliennes, le public est invité à pénétrer à l'intérieur du Placard d'Eden Ophrat, dont le couloir sombre mène à une oeillère, à travers laquelle le spectateur peut regarder un vidéo-collage de l'oeil de l'artiste flottant sur une barque qui vogue sur la mer au clair de lune. Autre illustration israelienne particulierement remarquable de cette grande exposition, les élèves de l'École d'Art Visuel proposent, à l'intérieur des différentes sections, plusieurs performances liées aux thèmes abordés, comme, par exemple, le magnifique travail de l'une des élèves, actrice de son oeuvre ou elle se transforme en une créature mi-femme mi-arbre, campée sur des échasses cachées par un immense tissu blanc, qui respire dans un large tuyau en acordéon collé à son visage, pour gonfler et dégonfler avec bruit un ballon de papier collé à son ventre, évoquant, entre autres, la mystérieuse symbiose entre la mère et le foetus. Le public pourra aussi découvrir, pour la première en Israel, l'expérience assez surprenante du film Un Chien Andalou de Salvador Dali et Luis Bunuel, projeté avec des voix-off en hébreu.

Le Musée d'Israel est mondialement reconnu comme l'un des leaders internationaux de la recherche et de l'exposition du mouvement surréaliste. La richesse de la collection des oeuvres exposées dans l'exhibition « Surréalisme et au-delà » est exceptionnelle. Elle est illustrée par un magnifique catalogue en couleur de 280 pages, contenant les textes de Werner Spies, Dawn Ades, et Adina Kamien-Khazan. 

 

Jerusalem Post édition française,
6 mars 2006.

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Sandrine Ben David
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